
Il a fallu des jours, des mois, des nuits sans sommeil, un post-partum dans lequel on se perd
ou serait-ce seulement le corps qui parle, qui hurle, boosté par les troubles hormonaux, esseulé, subissant ce que jamais il n’avait eu à traverser ?
Il a fallu des crises, des éloignements, des distances choisies et d’autres subies, des soignants qu’on retrouve, qu’on quitte, et d’autres qu’on essaie et qui nous sauvent
ou serait-ce seulement la vie qui se sauve de moi-même, qui cherche à guérir des maux non-traités, au stade permanent de blessure sous-jacente et oubliée ?
Il a fallu des mots, des heures de parole, des ruminations glaçantes, des débordements, des litres de pleurs, de l’épuisement, une nouvelle addiction, la mort présente à mes côtés partout tout le temps, une tête prête à exploser qui crie dans l’oreiller
ou serait-ce seulement la difficulté de faire face dans une période de fragilité où l’estime de soi est supprimée et de rester seule si seule face aux prédateurs assoiffés d’asservissement ?
Il a fallu la force d’une mère malgré tout cela et l’amour d’un homme malgré tout cela pour réparer et consolider le lien d’amants, de parents, d’humains bons et sensibles
ou serait-ce seulement l’envie d’être sereine, d’éloigner la souffrance et qu’elle ne soit plus mon essence et ma manière d’obtenir l’amour que je devrais mériter ?
Il a fallu cette enfant pour m’élever enfin au rang de moi-même, une adulte qui s’aime, et me sauver d’une quête de chaos et des extrêmes
ou serait-ce seulement la quête d’un équilibre selon mon propre logiciel, dire adieu aux fantasmes et aux illusions de perfection ?
Se dire qu’une belle vie est possible
malgré tout cela.
Construire une famille à soi.
Pour moi et pour elle.
